Construire un arc
Suivez la fibre...
Il s'agit de la fibre du bois bien évidemment!La page originale a l'origine de cet article est accessible à l'adresse suivante: http://www.murraygaskins.com/abw.html
Je me rappelle encore de mes impressions l'après-midi où j'ai appris à suivre la fibre pendant la construction des Arcs. Mon ami Herb Wyatt, qui a du sang Indien Cherokee, arrivait juste d'une visite dans sa famille en Oklahoma. Herb avait rendu visite à son père qui avait été très malade, et toute la famille s'était retrouvée à sa maison.
Alors qu'il était là-bas avec son frère, ils avaient fait leur promenade traditionnelle vers le ruisseau, puis avaient cherché, coupé et ramené à la maison en Géorgie quelque chose pour lequel j'avais pesté contre Herb pendant une éternité. Bien sûr, Herb avait ramené quelques morceaux d'Osage orange pour lui et moi, afin de construire nos premiers arcs en Osage.
Il y avait des arbres qui avaient poussé prés de la rivière rouge, puis qui s'étaient retrouvés à l'ombre, étaient morts, et restaient toujours debout. Les frères s'étaient débrouillés pour trouver des piquets de clôture aussi, et les avaient ramenés pour faire "bon poids".
Les morceaux qu'il m'avait ramenés avaient tous 15 cm de diamètre, la plus grande partie étant truffée de petites branches, de noeuds et de trous. Une partie assez importante était même endommagée par les insectes.
Cela était assez commun, je dois dire, et offrait différentes opportunités. Ce bois avait quelque chose de spécial pour Herb, car il venait de là où il était né. Nous avions construit quelques arcs en Hickory à cette époque, et à chaque fois dans nos conversations on parlait de la fibre.
L'idée de refendre une bûche, puis de suivre la fibre d'un bout à l'autre, me préoccupait au plus haut point à l'époque. Je n'arrivais tout simplement pas à saisir le concept, ou voir comment faire. Le souvenir de cette pile de bois dans le coffre de la voiture, et mon sentiment de désorientation est aussi clair dans mon esprit aujourd'hui, que ce qu'il était dix ans auparavant.
Le père de Herb avait construit des arcs pour lui de ses fils à une époque où il y avait peu de "gardiens de la foi", mais pour Monsieur Wyatt, il y a certain d'entre nous qui construisent des arcs maintenant, qui n'auraient jamais appris à suivre la fibre. Quelqu'en soient les raisons, il n'avait jamais appris à ses fils la complexité et les subtilités de la construction des arcs. Herb disait toujours que lorsqu'il demandait comment faire un arc, son père lui répondait toujours "suit la fibre". Cette exhortation était très déroutante pour un jeune homme, qui voulait construire un arc mais en avait déjà un, si bien qu'il n'y avait pas de raison logique à prendre le temps d'en faire un autre. La question ne devint jamais très pressante, et alors Herb ne compris jamais suffisamment l'explication de son père pour faire un arc lui-même.
A cette époque l'emploi du temps d'un père de famille et de ses enfants était bien rempli. Il y avait une maison à construire, la terre à défricher, l'école, les provisions à acheter, le bois à couper, le service militaire, puis le mariage et une famille à soi. Il était facile pour un sujet comme la construction des arcs de se retrouver mis à l'écart. Même en retournant à la maison pour des visites, parfois à plusieurs années d'intervalle, la promenade au bord de la rivière pour trouver le morceau de bois approprié, ne donnait rien. Une fois, lors d'une visite, un morceau de bois parfait fût trouvé, coupé, et mis à sécher dans les combles de l'abri-garage. A la visite suivante, le morceau de bois avait été détruit par les térébrant (insectes perceurs de bois), et les projets d'arcs ruinés.
Comme vont toutes les choses sur notre terre, les projets d'arcs et le père de Herb passèrent. La question relative à suivre la fibre subsista, sans réponse, et on se la rappelait de temps en temps.
Peu de temps après que j'ai construit mes premiers arc en Hickory, Herb me rendis visite avec ses morceau d'Osage. Quand je vis les anneaux resserrés sur les extrémités du bois, et les courbures apparues après l'enlèvement de l'écorce et de l'aubier, je mis tout simplement l'Osage dans un coin à part pendant deux ans, construisis des arcs en Hickory, et lu quelques fois de plus le livre de Paul Comstock "The bent stick".
Après plusieurs essais ratés, un jour, je décidais de couper un morceau de 5x5 cm d'un des piquets de clôture avec une scie circulaire et de me faire un arc. Après avoir coupé les piquets, enlevé l'aubier, et poncé légèrement le bois (...) il apparu de façon évidente que quelque chose n'allait pas. J'avais bien sûr coupé tout droit à travers un morceau de bois qui était tout tordu. En faisant cela, j'avais coupé les fibres, et gâché mon morceau de bois. Il cassa rapidement pendant la mise au point.
J'avais lu des articles sur le fait de suivre la fibre, mais j'avais essayé de faire les choses à ma façon, et j'en étais arrivé à perdre mon temps et à gaspiller du bois qui était très difficile à trouver.
Ce que je vais dire est l'un des deux aspects fondamentaux concernant la fibre du bois, que vous devez savoir avant de commencer à faire un arc. Si vous sciez de l'Osage, ou tout autre bois, et si vous espérez en obtenir un arc durable, vous devez scier en suivant la fibre, suivant la direction dans laquelle l'arbre a grandi, et non pas à travers.
La meilleure façon de refendre un tronc est de le fendre avec un merlin ou un maillet et un coin juste après l'avoir coupé.
La fibre ou la direction dans laquelle l'arbre a poussé est visible d'après la façon dont pousse l'écorce. Cela peut être vu clairement avant même de couper l'arbre. De l'Osage parfaitement droit est assez rare. Observer quelques courbes dans l'écorce est assez courant. (...)
Maintenant supposons que nous ayons refendu un morceau de bois tout tordu, et ayant toujours l'écorce dessus. En orientant le coté avec l'écorce vers le haut il faut regarder l'extrémité du morceau bois et sélectionner le dernier anneau, juste sous l'aubier, pour devenir le dos de l'arc. Le dernier anneau est le plus foncé et le plus dense des deux types de bois qui composent l'arbre. Les anneaux les plus centraux sont mous, pleins de sève, plus fins et plus clairs. S'il y a beaucoup plus d'anneaux de ce type par rapport aux anneaux plus foncés et plus fins, vous devriez reconsidérer votre choix quant à ce morceau de bois.
Après avoir enlevé toute l'écorce et l'aubier au-dessus du dernier anneau, vous devrez racler et poncer les résidus de bois plus anciens pour les enlever du dernier anneau. Si le dernier anneau est abîmé, enlevez-le et raclez jusqu'à ce que vous soyez un anneau au-dessus de celui que vous avez choisi pour être le dos de votre arc. Tout cela semble assez évident, et l'est en réalité, tant qu'on considère des morceaux de bois rectilignes. Comme nous parlons d'Osage, nous allons probablement rencontrer un noeud ou un endroit où la fibre a du passer au-dessus d'un noeud. Si vous réussissez à suivre ces contours sans couper à travers le noeud, alors vous aurez bien suivi la fibre.
Je pense qu'il est bon de dire ici qu?une plane (traduction de l'Anglais "drawknife": couteau servant à racler le bois un peu à la manière d'un rabot) qui est émoussée, fait du meilleur travail qu'un qui serait coupant comme un rasoir. Il coupe si on le tire suffisamment fort, mais il se coince plus ou moins entre les anneaux, et les sépare en même temps qu'il coupe entre eux. J'aime que mes grattoirs soient aiguisés. Comme il n'y a pas autant de force appliquée sur un grattoir, les dommages causés à un anneau sont moindres que si tout le processus de grattage était fait par le couteau à tirer.
L'une des meilleures façons d'être sûr de suivre la fibre est de compter les anneaux au fur et à mesure qu'on les rabote. En faisant ainsi vous obtiendrez à la fin le dos de votre arc, composé d'un anneau continu. Si les anneaux sont larges et épais, tout sera probablement pour le mieux. Les entailles causées par inadvertances par le couteau peuvent être grattées et poncées.
Toutefois, comme nous nous intéressons à la construction d'un arc en Osage, les anneaux sont probablement assez fins, et il y a des chances pour qu'on ai entaillé jusqu'à l'anneau suivant. C'est pourquoi je recommande de regarder d'assez prés, de prendre un grattoir et de gratter jusqu'à l'anneau voulu. En faisant ainsi, l'anneau est laissé sans défauts qui l'affaibliraient.
Je me suis aperçu qu'une lame de scie circulaire coupée en deux fait un grattoir très efficace pour cette seconde opération de grattage.
Les noeuds sont à prendre en compte lorsqu'on suit la fibre. Lorsqu'on refend une bûche, les fibres se séparent en tournant autour des noeuds.(...) C'est mieux de laisser un peu de fibre autour d'un noeud. Un ou deux anneaux sont généralement suffisants (...)
Afin de traiter ce sujet de façon appropriée, il est maintenant nécessaire d'attirer l'attention sur le fait que s'il y a une sur épaisseur de la fibre sur le dos de l'arc, il y a la même en regard sur son ventre. Pendant la taille de l'arc, il n'est pas acceptable de raboter ou de couper un noeud (en mettant tout "à niveau"). En faisant cela vous coupez les fibres et créez un point de faiblesse dans l'arc.
(...) Au fur et à mesure qu'on affine les branches (aussi bien en épaisseur qu'en largeur), on doit suivre la fibre. L'affinage doit se faire également et uniformément sur les deux branches. (...)
Ne soyez pas effrayé par cet aspect de la construction de l'arc. Plus vous attendrez avant de vous lancer, plus vous perdrez de temps. Après un ou deux arcs, tout ce processus d'enlever l'écorce et l'aubier, puis de suivre la fibre prendra moins de 30 minutes dans la plupart des cas. Allez-y, vous pouvez le faire!